Quiz de l’été
Too cool for school : à quel art s’appliquer ?

En treize questions et trente-neuf réponses, le service Orientation d’Holy Of Holies fait de l’ombre aux plus belles brochures de l’Onisep et vous conduit à rebrousse-poils sur le chemin de l’école. Retour en forme de QCM sur l’éducation aux « zarzas ».

À l’école :

1. Retour sur les bancs de l’école : quel est le meilleur souvenir que vous gardez de ces années d’études ?

Le premier jour quand les profs ont dit « ici, l’ambiance c’est pas la compétition mais l’émulation ».
Les soirées boulot-party dans nos appartements.
La première année d’euphorie post-concours : on avait repeint toute la salle, affiché des photos du ministre de la culture, et on scotchait les sacs à dos des gens sur les murs du couloir « Philippe Starck ».

2. Et le pire moment ?

La demi-heure avant de passer mon diplôme, alors que je me retrouvais en train de coller mes dernières maquettes à quatre pattes dans le couloir.
Quand une prof sortie d’on ne sait où nous a montré un banc des Bouroullec en disant « alors voilà c’est un objet très design, je l’ai vu chez des amis la semaine dernière, il est très confortable en plus ».
Monter sur une table et vendre à la criée un set de verre en cristal (exercice censé développer notre capacité à vendre n’importe quel projet dans n’importe quelle circonstance).

3. Au bout de plusieurs années de Research & Development, vous parvenez à l’acmé de vos études… Votre titre de diplôme, c’est plutôt :

poético-post-industriel : Perdessence.
scientifico-artisanal : L’étreinte du Zelfo®.
écolo-défricheur : Culture mobilier. Vers de nouveaux matériaux chanvre.

4. Quel type de problématique y est abordé ?

Comment réactiver un terrain en transition, le rendre disponible à de nouveaux usages, projets, constructions.
Broder sur du tissu le plus vite possible en pleurant le moins possible.
Imaginer un service de mise en réseau de l’hôtellerie indépendante face à la concurrence des grandes chaînes.

5. Si vous deviez résumer votre formation en trois verbes, ce serait :

S’inquiestionner / analyser / référencer.
S’immerger / charretter / recommencer.
Conceptualiser / simplifier / maîtriser.

6. À quel(s) métier(s) vous destine alors votre formation ?

Ça n’a jamais été clairement formulé. Je ne me suis jamais destiné(e) à un métier, mais plutôt à une pluralité de métiers.
Designer.
Directeur artistique, graphiste, illustrateur… comme c’est écrit dans la brochure.

À la sortie de l’école :

7. Après un brillant parcours étudiant, diplôme(s) en poche, vous vous lancez dans la vie active… Quel est votre premier job à votre sortie d’école ?

Chargé(e) de clientèle dans le milieu bancaire.
Mise en page du rapport d’activité de l’institut national de recherches archéologiques préventives pour un atelier de création graphique.
Assistant(e) sur des projets de scénographie, design et architecture d’intérieur.

8. Et quelques années après, vous devenez… ?

Merchandiser Manager pour une grande maison de prêt-à-porter.
Illustrateur. Je dessine des objets, des espaces, des évènements, des ateliers pédagogiques et des workshops pour différents publics.
Je fais du design, j’enseigne le design, je construis ma maison et fais du vélo.

9. Aujourd’hui, qu’est-ce que la vie professionnelle vous apporte que l’école n’a pas fait ?

Comprendre que la vie professionnelle ne se construit qu’au travers des rencontres et du lien que tu établis avec les gens. Que parfois le réseau fait plus que le travail.
Je me suis rendu compte que la mode était une industrie. Avec des objectifs très concrets, une communication omniprésente, un spectre de création assez balisé et un maître mot : vendre.
Evaluer le prix de mon travail, faire un devis et le faire signer. Utiliser Excel, parler anglais et téléphoner sans trembler.

Aujourd’hui

10. Suite à vos premières années de carrière, l’heure n’est pas au relevé des compteurs mais à un état des lieux… Comment résumez-vous les principales compétences acquises durant votre formation ?

Se débrouiller par soi-même avec parfois pas grand chose et en toute circonstance ! Mais aussi acquérir une certaine souplesse du cerveau, et manier l’autodérision.
Concevoir des supports de communication, avec les techniques traditionnelles de mise en œuvre graphique ainsi que la suite Adobe.
Savoir s’adapter à une problématique, définir un cahier des charges pour répondre à ces même problématiques, réussir à s’éloigner de ses « goûts » afin d’y répondre de façon pertinente.

11- Quels ont été les principaux défauts de votre formation au regard de votre parcours depuis ?

Ne pas aborder une seule fois ce sujet : « Comment gagner sa vie en étant auteur à la sortie de l’école ? »
Ne pas apprendre à réellement dessiner (concevoir) des objets.
La surprotection des profs. On a besoin d’être en entreprise pour apprendre, l’école donne quelques clefs pour se découvrir, pour provoquer des déclics créatifs mais l’insertion pro est essentielle.

12- L’école est une base possible, voire nécessaire, pour se construire. Que vous a-t-elle apporté dans votre rapport au monde ?

Un appétit pour la chose technique.
Une renommée et un statut.
De nécessaires savoirs, des processus de compréhension du monde ; des manières de réfléchir, en fait.

13- Enfin, quelles utopies l’école a-t-elle fait naître en vous et que vous vous attachez encore à réaliser aujourd’hui ?

Que je peux faire évoluer mon métier au gré de mes préoccupations, de mes engagements et de mes sentiments. Et aussi que le travail collectif est précieux. Je ne peux pas travailler tout seul !
Faire quelque chose de juste et respectable avec mes mains (et accessoirement mon ordinateur).
Bien faire mon travail, évoluer sans cesse et le faire en restant quelqu’un d’accessible, de sympathique et d’humain.

Résultats : les trois petits cochons au royaume du design

Vous avez une majorité de  : Le petit cochon à l’école de paille…

Il s’est très bien accommodé de son école façon arte povera ; quelques brins de paille peuvent suffire pour lancer un feu de joie, du moment que la bonne problématique est posée. Attention à cet enseignement à double tranchant : l’école de paille sait doter ses élèves d’une grande capacité d’adaptation et d’une curiosité insatiable qui les mènent aisément de champs de maïs en champs de bataille sans pour autant leur fournir les armes essentielles pour mener le combat. À l’école de paille, on compte paradoxalement sur l’autonomie des cochons pour apprendre les ficelles du métier auquel elle annonce pourtant former. Il faudra un certain temps à chaque petit cochon sortant pour s’acclimater à la réalité pratique et économique du milieu professionnel ; mais ces détours, même laborieux, seront toujours payants.

Son grand méchant loup : Ne pas savoir de quoi demain sera fait.

Vous avez une majorité de  : Le petit cochon à l’école de bois…

Il manie autant le crayon que la souris et cela toujours avec humour et adresse. Curieux et passionné, il doit à l’école son appétence pour le monde qui l’entoure et un apprentissage approfondi des méthodes et outils de création. Répondant ainsi avec succès aux demandes les plus complexes, il continue cependant de découvrir et d’explorer les méandres de sa « voix intérieure ». Car si l’école de bois apprend aux cochons à ouvrir l’œil sur la multiplicité des perspectives possibles, elle oublie bien souvent de leur indiquer le chemin vers leurs ressources fondamentales et la maîtrise de leur brasier interne. Bûcheron dans l’âme, il continue à charretter mais les esprits de la forêt le lui rendent bien.

Son grand méchant loup : La hausse du prix de l’essence. Heureusement il a bientôt terminé son vélo.

Vous avez une majorité de  : Le petit cochon à l’école de briques…

Il est pragmatique et trace son chemin avec rapidité et précision. Il a été formé à un métier bien précis qu’il exerce aujourd’hui avec brio et dont il connaît tous les secrets sur le bout des pattes. Petit cochon ambitieux, il est devenu grand cochon éclairé. Il a appris à tirer profit de toutes situations et a même développé des aptitudes d’équilibriste. À l’école de brique, il a appris à filer droit et à ne pas se poser de questions, au risque parfois d’y semer quelques poils et d’oublier de remettre un peu d’huile au moteur et au cœur. S’il regrette encore que l’école ne lui ait pas apporté des bases en béton, il peut s’enorgueillir d’avoir su par lui-même construire les fondations de sa grande entreprise et de jouir de la renommée de sa formation.

Son grand méchant loup : Ses employés … Dieu, mais qu’ont-ils appris à l’école ??! …

Texte : Creative Commons

tweet partager sur Facebook