La forme, sans tabou

Où en sommes nous avec la forme ? C’est à partir de cette question, à la fois banale et dérangeante, que Claire Brunet (philosophe, enseignante et co-directrice du département design à l’ENS de Cachan) a organisé un cycle de conférences à l’ENSCI-Les Ateliers.

Ce cycle a été initié suite à un traumatisme vécu lors de jury de diplômes à l’ENSCI : des ondes hostiles ont été ressenties autour des questions concernant la forme. En effet, le mot semble aujourd’hui refoulé de la langue des designers, comme a pu l’être le dessin pendant un temps. "Mise en forme", "déformation", "processus de formation" deviennent alors des expressions avec lesquels les designers jonglent. Les réactions de l’auditoire ont en partie confirmé cette gêne et ce quasi tabou de la relation du design à la forme.

Le 13 octobre 2011, le premier invité fut Pierre Charpin, designer qui n’hésite pas à assumer son intérêt pour l’objet comme forme plutôt que de l’objet comme produit.


Vases News Shapes, réalisés pour la Manufacture Nationale de Sèvres, 2008, ©Pierre Charpin

À propos du projet mené avec la Manufacture de Sèvres, Pierre Charpin déclarait :
"Produire une forme destinée à recevoir un hypothétique futur décor de la part d’un hypothétique futur créateur, équivaut, suivant les termes de la Manufacture et de sa tradition, à produire une forme « inachevée ».
C’est bien cela qui m’a enchanté.
Bien sûr cela ne veut pas dire, toujours suivant les termes de la Manufacture et de sa tradition, que la forme soit inachevée dans le sens de mal achevée (cela est impensable à la Manufacture), mais qu’elle n’a pas encore parcouru l’ensemble du cycle qui la fera passer du statut de formes disponibles à celui de forme accomplie. Du statut de forme inventoriée à celui de forme exposée. Ou disons, du statut de forme à celui d’objet."


Exposition Ignotus Nomen à la Galerie Kréo, 2011, ©Pierre Charpin

La forme, chez Pierre Charpin, a pour qualités essentielles d’être ouverte et disponible à l’interprétation. Il s’agit alors de "formes-réceptacles", et non plus de "formes-émetteurs".
Concluant sur le besoin de revenir à des questions de philosophie et de design élémentaires plutôt que de se perdre dans la complexité, ce premier volet ouvre déjà de sérieuses pistes de réflexion.


Vases prototypes Blown Glass par Cirva, 2001, ©Pierre Charpin

Au programme, jeudi 10 novembre, l’intervention de Emanuele Quinz, co-directeur de l’agence Mosign et Giuseppe Di Liberti, philosophe et professeur d’esthétique.
La conférence portera sur l’esthétique des nouveaux medias.

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