L’art d’être paysagiste, simplement
Marc Pouzol (atelier le balto) : à propos de Jacques Simon

Article et croquis : Marc Pouzol, atelier le balto, Berlin. Propos recueillis par Giulio Giorgi et Tony Côme.

À travers cette nouvelle rubrique intitulée "À nos maîtres", des concepteurs issus de divers horizons saluent ceux qui les ont formés. À l’occasion des quinze ans de l’atelier le balto qu’il a cofondé à Berlin, nous sommes allés à la rencontre du paysagiste Marc Pouzol. Sans surprise, c’est Jacques Simon, à qui nous rendions récemment hommage, qui s’est très vite invité dans la conversation et qui est venu essuyer les plâtres de ce Panthéon.


« Monsieur Jacques Simon m’a dit un jour, alors que j’étais encore élève à l’École du Breuil en BEP agricole option horticulture : « Alors, toi qui aime tant dessiner, tu feras l’école du paysage de Versailles, non ? ». J’ai répondu : « Oui Monsieur ». Le lendemain, j’ai séché quelques cours pour passer presque toute la journée dans la bibliothèque de l’école et éplucher tous les carnets de dessin de ce Jacques Simon.

Des années durant, pendant mes études à l’École d’architecture de Paris-la-Seine, puis à l’École du Paysage de Versailles, j’ai étudié les croquis, par centaines, de Jacques Simon. Un par un, je les ai lus et relus, recopiés et parfois décalqués pour comprendre leur pertinence et leur force. Je les ai ingurgités pour, je crois, trouver moi-même un trait, un outil et en quelque sorte une signature.

On m’a souvent demandé si je loupais de temps en temps des dessins. Non, impossible ! Il faut juste savoir, avant de commencer à dessiner, où l’on va et combien de temps on veut y consacrer (m’avait soufflé Jacques Simon)...

Les règles de la perspective sont, elles, assez simples.

Je pense que Jacques Simon avait toujours, dans son regard sur le monde, une ligne d’horizon et un seul point de fuite devant lui, il analysait constamment le paysage de sa hauteur d’homme et de paysagiste. Ses dessins à « hauteur d’yeux » et à « main levée » m’ont appris à regarder le monde autrement. C’est même sans doute eux qui m’ont aidé à percevoir les outils qui permettent au paysagiste de transformer des lieux sans les aménager.

Je me rappelle souvent à quel point Jacques Simon adorait dérouler les rouleaux de calque d’étude pour que « ça avance ». Il nous montrait comment enchaîner les dessins. Ses dessins mêlés de notes se liaient les uns aux autres pour raconter une histoire et faire apparaitre, en traits et lettres, de nouveaux paysages.

Chaque automne, je pense aussi à Jacques Simon quand, au bout des branches de peupliers presque nus, restent quelques grandes feuilles qui dansent dans le vent.

Avant hier, mon ami et partenaire Marc Vatinel m’a dit, alors que nous nous rendions ensemble sur notre chantier berlinois où nous travaillons avec des étudiants de plusieurs écoles de paysage :

« Marc, j’ai rêvé cette nuit de... Jacques Simon. Il passait sur le chantier et disait : "C’est ça !" ».

Il faut dire que nous avions passé une grande partie de la soirée à échanger à propos de tout ce que Jacques Simon nous a appris et comment il nous a transmis sa passion d’être paysagiste de terrain.


Marc Pouzol,
atelier le balto.


PS : Jacques Simon est pour nous un transformateur d’espace, un cultivateur du regard, un semeur d’idées. Et il est le dessinateur des plus beaux manuels de paysage de tous les temps. »






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